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La présence


La situation de la pensée post-moderne, si ce terme peut prétendre à une acception précise et sérieuse, se caractérise peut-être par la transformation de la présence, désormais devenue une question, alors qu’elle fut longtemps tenue pour une réponse. L’incertitude de la présence ne constitue pas seulement une difficulté parmi d’autres, mais le signal et l’effet d’une présence de l’incertitude, présence radicale parce qu’elle pourrait bien signifier l’absence de toute certitude dans l’avenir, au moins proche. Ce qui définit l’époque du nihilisme. L’incertitude de la présence s’atteste à la croisée d’au moins quatre domaines de la pensée contemporaine, la métaphysique, la théologie, la théorie de la connaissance et la phénoménologie.
En métaphysique la question de la présence intervient dès les origines grecques, lorsque l’ousia se trouve pensée non seulement comme l’étantité de l’étant, mais, dans son opposition au devenir et aux accidents, comme la permanence de l’ontôs on – ou de ce qui en tient lieu.
L’insistance mise par Heidegger sur l’interprétation de l’on comme ousia et surtout de l’ousia comme parousia désigne une difficulté inesquivable, autant qu’une caractéristique permanente de toute l’histoire de l’ontologie (donc de toute l’histoire de la théologie métaphysique comprise dans l’onto-théo-logie). La théologie chrétienne (et juive) ne peut, de son côté, ignorer l’instance de la présence, puisque Dieu se manifeste dans la shekhina, que celle-ci se concentre sur le Sinaï, dans le Temple ou dans la personne du Christ. Si l’on admet la possibilité d’une révélation de Dieu par luimême, peut-on ne pas l’exposer selon des modalités de la présence ?
Mais il faudra aussi faire droit aussi aux nouvelles déclinaisons, à la fois confirmations et substitutions, de la présence dans la pensée contemporaine : l’ap-présentation (opposée à la présentation et à la représentation), la trace, la khora, la répétition, l’événement, le paradoxe, le néant etc.,. Donc aussi, en autant de compléments que d’oppositions, le sublime, le sacrifice, la jouissance, l’extase, l’idée d’infini en autrui, l’élection, le phénomène saturé, etc. Dans ce cadre, les questions de l’imagination, de la mémoire, de l’attente, donc les débats sur l’esthétique de l’arte povera, de l’abstraction, des arts minimaux, jusqu’à la “mort de l’art” dans l’“art contemporain” peuvent se relire comme autant de symptôme de la crise de la présence.
En un mot, peut-on et doit-on envisager la survie de la présence en son absence même ? Et qu’entendra-t-on dans cet oxymore d’une présence d’après l’absence ? S’agit-il d’une pensée faible, d’une illusion volontaire, d’un “dernier dieu”, d’un Ereignis, d’un nouveau commencement ou d’une eschatologie? En tous les cas, il s’agira de penser en écho à une étrange demande de saint Paul : «…avec crainte et tremblement, non seulement en ma présence, mais encore plus en mon absence travaillez à accomplir votre salut, » (Philippiens 2, 12).

Les textes doivent être envoyés d’ici le 15 Juin à s.bancalari@tiscali.it ou fv.tommasi@gmail.com et être rédigés dans une langue officielle de la revue – à savoir : français, allemand, anglais, espagnol ou italien – et ne pas dépasser la longueur de 35.000 caractères espaces compris.

Tous les textes envoyés seront soumis à un processus de « peer-review ».